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 En bordure du village, résidence des Kurage

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MessageSujet: En bordure du village, résidence des Kurage   En bordure du village, résidence des Kurage EmptySam 13 Juin - 18:41

Je me sortais péniblement du sommeil, sous les exclamations de Yukora, quelque part au coin de mon esprit. Il ne supportait pas la sonnerie du réveil, et me filait la migraine chaque matin, en hurlant comme une bête dont on n’étripe le cou. Je m’empressais de tendre le bras pour atteindre le petit bouton de l’objet, qui cessa son tintinmarre, et les hurlements cessèrent de marteler mon esprit martyrisé, mais encore à moitié endormi.
Avec un soupir, je constatais, en me regardant dans la glace, que j’allais devoir passer de longues minutes à me démêler les cheveux. Je n’aimai pas du tout mon apparence au matin, mes longues tignasses qui partaient dans tout les sens, et ma chemise de nuit trop ample et trop blanche, à laquelle j’avais du mal à m’habituer, même après trois ou quatre mois de sommeil commun.
Yukora s’était assagit, au moins, c’était un bon point. Je tâchais alors de redevenir présentable, munie d’une douche au jet particulièrement froid et de divers accessoires de toilettes. Ce fut chose faite, mais sans aucune prestesse, avec une lenteur calculée de jeune fille qui se pomponne. Enfin, personne ne songerait à la réprimander pour cela. En plus, je n’avais pas encore décidé de la manière dont elle remplirait sa journée.

J’avais reçut une convocation de l’académie, certes, pour s’entraîner dans le désert, mais je doutais que ce fut une idée splendide, à vrai dire. Je pouvais très bien tomber sur un crétin finit, un de ceux qui me méprisait, et qui ne me voyait que comme une arme, et en ce cas, la journée serait surtout un long supplice, d’où je ressortirais, certainement, plus forte, mais également meurtrie et agacée, agressive. Et cela ne ferait qu’ajouter à mon moral déjà bien entamé par mes mauvaises années passées à l’académie des ninjas de Suna. Ce n’était pas chose nécessaire.
D’un autre côté, si mon senseï s’avérait être une personne sensée ou, mieux, qui ne connaissait absolument rien de la sale réputation des Kurage, progresser serait plaisant, même si l’entraînement était ardu.
Ce pouvait être une bonne expérience.
Et puis, après tout, si je n’y allais pas, j’avais de multiples possibilités de mauvaises rencontres qui terniraient encore d’avantage ma journée. En fait, se rendre à la convocation était une idée plutôt envisageable.

Après m’être vêtu, je jetai un regard circulaire sur la pièce. C’était la seule pièce de la maison où je me sentais vraiment à l’aise, vraiment chez moi. C’était sans doute car c’était la seule que je jugeais normale, et qui correspondait à ma vision des chose. Il n’y avait pas d’ornements sur les murs, pas le moindre poster ou quoi que ce soit, la tapisserie était rose pâle, d’un rose beaucoup moins prononcé que mes cheveux. Tout était bien rangé, ordonné, avec un bureau, une petite bibliothèque et une armoire pour mes vêtements. Mon désir de simplicité sautait aux yeux à la vue de ce simple aménagement.

Yukora : ‘’ Tu devrais cesser de rêvasser, tu risquerais d’être en retard, gamine. En plus, quand tu ne fais rien, je m’ennuie un peu. ‘’

Je lui envoyais vite fait quelques pensées d’agacement, mais m’empressais tout de même de descendre les escaliers, et de traverser les pièces sombres jusqu’à atteindre la cuisine, où j’attrapais quelque chose à grignoter avant mon départ.
Cette maison, bien que j’y vive depuis mon enfance, avait le don de me faire douter, de me faire peur, même. L’ombre y était trop épaisse, et la décoration un poil trop glauque à mon goût. Ma mère et ma grand-mère étaient friandes des petits, et même gros, os, des bocaux contenant d’étranges mixtures et de toute la panoplie des mages noirs, mais je n’aimais guère tout cela.
En plus, c’était la cause de la plupart de mes mésaventures passées et futures, et de mon statut de ‘petite démone’.
Un ricanement au coin de mon esprit acheva de me mettre en rogne.

Yukora : ‘’ C’est juste qu’elles ont bon goût. J’adore cette décoration, moi aussi. Enfin, chacun a ses peurs, ici, je suppose, et une gamine comme toi ne peut pas comprendre que tout ceci est d’un raffinement certain. ‘’

S’il avait eut une présence physique, il n’y avait aucun doute que je lui aurais démolit la figure avec une des chaises qui étaient posées autour de la table. Il semblait un peu trop ‘présent’, ce matin, c’était assez inhabituel. Sans doute n’avait-il rien à faire dans son plan et passait-il donc son temps à la provoquer un peu pour se divertir.
Je choisis de ne pas lui donner de satisfaction en lui répondant, et m’empressais plutôt de chercher quelque chose d’autre à me mettre sous la dent dans le frigo. Ne trouvant rien, j’arrachais une barre chocolatée à un placard, et je pris la porte après avoir enfilé mes sandales.
Enfin, je voulus prendre la porte. La présence de ma mère arrêta net mon mouvement. Grande, avec une ombre qui s’étirait sans fin, et une taille fine, elle suscita un léger déglutissement, à peine audible, dans ma gorge.

- Eh bien, tu sembles pressée. Tu vas quelque part en particulier ?

- J’ai été convoquée par l’académie, je me rendais dans le désert pour m’entraîner.

Ma mère me dépassa sans plus de cérémonie, et je retins un grondement hargneux. Elle me faisait peur, et me révoltait à la fois. C’était à cause de cette femme que j’étais ainsi, possédée et promise à devenir un réceptacle pour divers démons.
J’avais accepté tout cela, car cela me rendait plus fort, mais je ne pouvais m’empêcher de pester pour moi-même quand je la voyais.
En plus, elle avait choisit pour moi le démon le plus stupide qui soit …

Yukora : ‘’ Fais attention à tes paroles, morveuse. Tu pourrais regretter un jour de me nommer de la sorte. Si je me libère, ce seront tes tripes que je répandrais les premières sur le sol de votre monde. ‘’

Je souris et lui tirais mentalement la langue. Il ne me faisait pas peur, après tout, il était tenu à un sceau et ne se libèrerait jamais.
Après m’être assuré que ma mère ne me regardait plus, j’ouvris la porte et sortit pour me rendre à mon aire d’entraînement.

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Kimatzu
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MessageSujet: Re: En bordure du village, résidence des Kurage   En bordure du village, résidence des Kurage EmptyMar 23 Juin - 23:36

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Tsuyu
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MessageSujet: Re: En bordure du village, résidence des Kurage   En bordure du village, résidence des Kurage EmptyLun 14 Juin - 15:39

La porte se referma sans que son mécanisme n’émette aucun son. Pourtant, je l’avais claquée. Ca ne me surprit pourtant pas : quand j’eus l’âge d’avoir quelques notions de physique, cela m’avait surprit, mais un seul examen attentif m’avait suffit pour comprendre les raisons de son mutisme. En fait, il y avait tellement de toiles d’araignée dans l’encadrement qu’elles amortissaient les chocs entre les deux parties de bois. Bien entendu, ce n’était pas que l’encadrement : la maison toute entière était un nid à arachnides. Et à toute sorte d’autres insectes moches et constitués essentiellement de pattes et d’antennes et de mandibules et d’ailes bourdonnantes et … enfin, qui avaient tout pour faire peur aux enfants et affuter ma mauvaise humeur. Je jetais un regard agacé à toute cette sinistre décoration, puis enlevais mes sandales. Là encore, ce sont des scarabées gros comme la paume de mes mains qui les recueillirent, et les alignèrent parfaitement. Non contentes de terroriser les villageois, maman et grand-mère s’amusaient aussi avec ces bestioles, les dressant, grâce au joug de la peur et leurs démons qui l’engendraient, à exécuter toutes sortes de tâches. Elles trouvaient cela parfaitement distrayant, et moi je trouvais cela parfaitement dégoûtant. Question de point de vue, mais je n’aimais pas cette maison. Ni ses locatrices.

J’époussetais ma robe fendue, déjà couverte de miettes sales et cotonneuses, et poursuivais ma descente aux Enfers, jusqu’au salon. Les étendards du mal s’y étalaient en nombre. La collection lugubre de ma grand-mère, notamment. Celle-ci était très vieille et avait connu une bonne partie de l’ère de la Lune Rouge. Durant cette ère, elle avait combattu du côté de la rébellion et avait pour seule mémoire de cette époque un os du corps des adversaires qu’elle avait fait tomber. Il y a plus de deux cents os dans le corps humain, donc avec un os par personne, elle n’avait pas tout à fait réussie à reconstruire un squelette humain au complet, mais elle n’en était pas si loin et on ne voyait pas, à l’œil nu, la différence avec un squelette complet. Pour un spécialiste, peut-être, mais je ne l’étais pas. Le pire dans tout ça, c’est qu’elle entretenait soigneusement sa collection. Certaines mamies tricotent de bonnes chaussettes de laine pour leurs petits-enfants, quand elles ont du temps libre. La plupart font ça. Moi, j’avais hérité de la seule qui, non seulement ne m’en faisait pas, mais en plus se servait de ces temps de repos pour astiquer et vernir des os ! Vernie, moi, je ne l’étais pas en tous cas. Enfin, elles n’étaient pas au salon. Inutile donc de m’attarder parmi les tapis de chair et les décorations cartilagineuses.

La cuisine était déserte elle aussi. Je tiquais en constatant qu’elle était toujours aussi propre. Si seulement il n’y avait pas eu une collection de couteau de boucher à côté de l’évier, et que le frigo n’était pas rempli, outre les nombreux morceaux de viande particulièrement saignants (et vu les post-its sur la porte du réfrigérateur, on se demandait si ce n’était pas une viande douteuse), il y avait bien sûr d’innocents légumes, mais aussi divers vins rouges, et surtout, dans le fond, un bon nombre de poches de sang. Ca leur servait pour leurs rituels démonologiques. Enfin, je dis d’innocent légumes, du vin … Mais elles soignaient tout de même leur image de marque : vin rouge, poivrons rouges, betterave déjà soigneusement épluchées et découpées, des fraises et toutes sortes de groseilles, de myrtilles, de baies et de framboises, des tomates … Tout était strictement du même panel de couleur. Mis à part le citron et le pamplemousse, conservés dans les bacs du dessous. Mais le pire, c’était sans doute les pommes rouges. Pourquoi ? Si vous ne le concevez pas, repensez à quelques contes bien connus où les sorcières machiavéliques usent de ces ustensiles malsains. Oh, honte à moi, dire que j’aime tant ces pommes … C’est bien une des seules choses qui ne me flanquait pas la chair de poule, dans cette maison.
Toujours était-il que je n’avais retrouvé ni ma mère, ni ma grand-mère. Pourtant, j’avais été convoquée dans l’urgence et la précipitation, d’après Mariya. Il eût même été logique qu’elles m’attendent à l’entrée. Je visitais rapidement les chambres à l’étage supérieur, mais ne trouvait rien, pas une seule trace.

Mais je finis par m’injurier pour ma bêtise naïve, et me rappeler la raison probable de ma convocation : l’initiation aux arts du Koumajutsu, les invocations démoniaques. Cette initiation était plutôt du type illégal. Et en plus c’était répréhensible par la loi du village de Suna. Et puis, c’était déjà assez glauque d’imaginer des démons à l’intérieur des corps d’une jeune fille ... Mais ça, c’était pour un être humain normalement constituée. Pour les deux autres harpies azimutées, ce n’était sans doute pas assez. Mon initiation se ferait au plus proche des entrailles de la terre : donc au fond de notre immense galerie souterraine … Enfin, notre cave quoi. Le repaire des insectes assouvis par leurs soins, et de leurs congénères les rongeurs. Pour y aller avec le plus grand soin, avec les pincettes les plus graciles, et ne surtout pas gâter la situation, c’étaient de très gros rongeurs. Pas de simples rats d’égout donc. Des rats d’égout mutants, puants, bâfrés de vacherin, aux cavités orbitales d’une écarlate flamboyante de malveillance, aux crins éparses et cendreux de détritus nauséabond, tout ça dans une cacophonie de chicotement empuantis, miasmatiques, nauséabonds, infects, pestilentiels, et définitivement suffocants. Et en plus, ces sacs d’étrons coprolithiques me fixaient et couinaient tout du long de mon chemin, multipliant mon agacement à chaque seconde qui s’écoulait.

‘’ Toi, tu es encore en train d’insulter mes rats. Fais gaffe à ta langue, même si tes pensées te trahissent. Il se pourrait qu’Astaroth se vexe de te savoir si peu polie avec ses légions. ‘’

Je vous présente mamie Beniha, maîtresse incontestée des arts du Koumajutsu capable d’invoquer son démon personnel dans son corps. En gros, j’aurais son niveau quand je parviendrais à forcer Yukora à entrer dans mon enveloppe charnelle, et à le contrôler. Son entité à elle, c’est Astaroth, un démon énorme à la puissance phénoménale. Il commande aux rats, et je me demande parfois si ce n’est pas le démon de la puanteur : quand elle l’invoque, ça empeste à trois kilomètres de rayon. Mis à part ça, ce sac dos est une vraie furie, complètement siphonnée, avec un rire qui abîme les oreilles et un engouement pour la démonologie qui frise l’hystérie.

‘’ Laisse maman, ce n’est pas sa faute si elle n’aime pas les rats. Ce qui me chagrine d’avantage, c’est que nous avions exigées une convocation immédiate et que tu aies un peu traînée, Tsuyu. Tu n’avais pas deviné que cela se déroulerait dans la cave, c’est bien cela ? Pourtant, c’était la seule issue possible parmi toutes les suppositions que tu aurais put élaborer. Je sens que ta confiance en toi et ton potentiel ont un peu grandit, mais ce n’est pas encore ça, fillette. Regrettes-tu ton manque de jugeote ? ‘’

Froide, austère, cassante. Et très directe. Je vous parlais de pincettes graciles et délicates, toute à l’heure, eh bien je vous présente maman Shuuna. Déteste la douceur et les phrases moelleuses et ronflantes, affectionne l’efficace et le percutant. Elle a une attirance particulière pour tout ce qui est morbide (en même temps, vous avez vu l’état psychologique de sa mère à elle ?). Cependant, contrairement à sa génitrice, elle est encore capable d’amour et ça lui arrive d’être posée, voire gentille, et même de s’intéresser à moi ou de me protéger, de me conseiller. Enfin, occasionnellement, à part maîtresse du Koumajutsu, elle est également mère. Pourtant, elle a à peu près le même niveau que mamie : elle est capable d’invoquer dans son corps son démon personnel. La sienne, c’est Bélial, ancien ange du bien devenu un démon anarchique. Ce doit être en fonction de notre entité qu’on est capable ou non de garder une personnalité potable … Et c’est pour ça que mamie sent mauvais des pieds, et que maman est capable d’alterne les fureurs les plus chaotiques et les preuves d’affection. Deux instructrices pareilles pour mon entrée dans l’univers des utilisateurs du Koumajutsu. Quelle aubaine ! Enfin, ce serait une aubaine si je me montrais docile : ma mère pourrait ainsi tempérer le caractère virulent de ma grand-mère.

‘’ Je le déplore. Mais je ne suis encore qu’une novice, je commettrais donc des erreurs, et sûrement beaucoup. Cependant, celle-ci, c’est dorénavant de l’histoire ancienne. Cette logique est maintenant pour moi des plus limpides et je m’injurie à voix basse pour la bêtise dont j’ai put faire preuve. ‘’

Ma mère me sembla un peu étonnée : quoi de plus normal, alors que je l’avais habituée à commenter chacune des paroles qu’elle prononçait avec discourtoisie et acharnement. Il y avait une forte carence en grossièretés dans mes paroles, et ma grand-mère le remarqua aussi. Elle modifia de manière courbe la position d’un de ses sourcils, par ailleurs, et m’adressa un regard décontenancé. Elle devait déjà avoir préparé un long laïus moralisateur et dégradant, et regrettait assurément de ne pouvoir me le faire entendre. Maman me prit les mains et me fit asseoir sur une chaise branlante, en face de la sienne. Quand je ne répliquais pas, ce que j’aimais le plus, c’est quelle devenait plus douce …

‘’ Je suis content que tu comprennes que tu as encore du chemin à parcourir. Par contre, j’ai remarqué que tu dégageais un peu plus de force et d’assurance. Tu as dû beaucoup apprendre aujourd’hui, n’est-ce pas ? Tu veux me raconter ? Je sais bien que je ne suis pas très ouverte pour ce qui est des équipes de ninjas, à cause de la méfiance que notre famille suscite, mais tes équipiers ne savent rien des pratiques démoniaques, pas vrai ? Ils doivent déjà, et pour le moment, t’accorder du crédit. Enfin, qu’as-tu appris avec eux ? ‘’

‘’ En fait, j’ai d’abord commencé l’entraînement seule avec Mariya-senseï. C’est une Chuunin qu’on dit être une excellente pédagogue. Elle m’a enseigné à maîtriser mon affinité élémentaire, puis une attaque basée sur celle-ci. Un deuxième équipier, Wakida, est arrivé par la suite et nous avons appris ensembles la technique d’adhésion. On a même fait une course : je l’ai grillé sur la fin. C’était sympa. D’ailleurs, demain, nous partons en mission tous ensembles. ‘’

‘’ C’est une journée bien remplie, profites bien de ces moments, mais n’aie pas trop d’espoir, tu comprendras que nous sommes destinées à œuvrer seules pour le bien du village et de notre famille. Notre art est satanique et ensemence la désolation. C’est un mal pour vous tous que tu te lies à eux. Restes avec eux le temps que ton art bourgeonne, mais au moment où il fleurira, tu devras les quitter. Alors, s’il te plaît, ne t’attaches pas trop, je ne veux pas que tu souffres inutilement. D’accord ? ‘’

‘’ Oui, maman. C’est évident. ‘’

Mon enthousiasme avait été freiné net par la réalité. Je pris des positions plus sombres, et je savais que, demain encore, je me souviendrais de ces paroles. D’autant plus que je voyais que la maman attentionnée n’était plus devant moi. La femme de marbre, givrée, glacée, froide comme la pierre et l’eau d’une cascade sous le vent de l’hiver. Comme les nuits dans le désert de Suna. Elle réfléchit un moment, puis ses yeux croisèrent ceux de ma grand-mère. Cette dernière réfléchissait aussi. Que pouvaient-elles bien se demander ? En tous les cas, quand ma mère s’adressa de nouveau à moi, ce fut de la voix mielleuse qu’elle prenait pour me soutirer quelque chose. Un aveu, une information … Tout ce que je possédais, les trésors de mon esprit, face à cette intonation aux griffes crochues, prédatrices, ils se dérobaient à mon emprise, pour la rejoindre. La rallier. Cette femme avait un art de la mutinerie spirituelle particulièrement développé, et ses seuls instruments étaient ses yeux impérieux, sa voix enjôleuse, et ses cheveux qui se déroulaient le long de son dos et, mirage ou pas, semblait se déplacer lentement jusqu’à moi, pour s’embobiner autour de mon corps, le serrer, l’asphyxier. Cette ambiance était suffocante, et je ne pouvais y résister.

‘’ Dis-moi, ma chérie, quelle est ton affinité ? ‘’

‘’ Suiton. ‘’

‘’ Comme moi. C’est bien ce que nous pensions. Notre affinité correspond à l’exact inverse de celle de notre démon. C’est comme si la nature, le hasard génétique, nous donnait le droit, dès notre naissance, de s’approprier ses pouvoirs. Ta grand-mère et moi nous nous posions la question, mais je pense que cette troisième preuve est une réponse satisfaisante, et nous la validons pour le moment. Bélial et Yukora sont des démons de feu, et nous sommes d’affinité aquatique. Astaroth est un démon de vent et de ténèbres, et ta grand-mère maitrise le feu, et a une double affinité de lumière. Tout me parait logique, pas toi ? ‘’

‘’ Ca parait évident, mais ce ne sont cependant que trois exemples : trois coïncidences sont possibles. Grand-mère ne se souvient pas des capacités de quelques unes de nos ancêtres ? ‘’

‘’ Bien sûr que non, sinon nous ne te demanderions pas ton avis. ‘’

‘’ Calmes-toi, maman. Elle ne cherche qu’à nous aider. C’est une remarque pertinente, qui plus est, même si elle semble nous sous-estimer un peu. Et puis, elle nous a apporté la réponse. Bref, on va pouvoir passer au programme qu’on a concocté, la véritable raison de ta présence, Tsuyu. ‘’

Je sentis une petite boule se former dans ma gorge. Une sphère où s’entremêlaient étroitement l’impatience et l’angoisse. J’allais enfin être initié à la puissance de la famille Kurage : le Koumajutsu, l’art des invocations démoniaques.

‘’ Alors. Pour aujourd’hui, nous étudierons l’ensemble des bases. C'est-à-dire que tu apprendras à faire des rituels convenables, et nous testerons ta capacité à les exécuter en te faisant invoquer ton premier démon. Ce premier démon, comme tu le sais, est l’occasion d’un affrontement qui sera sans doute violent. C’est le premier, donc tu devrais t’en sortir facilement : on ne te fera pas invoquer un démon trop fort pour toi. Ce que tu ne sais pas, c’est qu’il n’existe qu’un chakra capable de le blesser : le chakra ténébreux. Tu devras apprendre à en imbiber ton corps pour que tes attaques et tes armes puissent endommager un vrai démon. C’est donc notre priorité. Dans l’ordre, ça donne : chakra ténébreux, maitrise des rituels, invocation du premier démon. Tu as compris ? ‘’

Une question qui n’en était pas vraiment une : si je répondais non, il ne faisait aucun doute que ma grand-mère s’énerverait et me traiterait d’incapable ratée incompétente. Donc bon, j’acquiesçais. De toute manière, j’avais vraiment compris. Juste que j’ignorais totalement ce qu’étaient réellement ces techniques. Bon, avec le nom, et tous les livres sur les arts démoniaques que j’avais ingurgités depuis mon enfance … La famille Kurage était la dernière à pouvoir se vanter de maitriser le Koumajutsu et à avoir autant d’ouvrages sur les démons et la façon de les invoquer et de les manipuler, par ailleurs. Normal, puisque ces pratiques étaient bannies et les autels de scellement pour les démons personnels avaient tous été détruits deux ans après ma naissance. En somme, j’étais la dernière à pouvoir les apprendre, pour la raison que ma mère venait d’évoquer : pour réussir l’épreuve d’un démon et le vaincre, il fallait utiliser le chakra ténébreux qui provenait du démon personnel. Si je me souvenais bien de mes lectures, d’ailleurs, il fallait le lui arracher car il était rarement consentant. Ma génitrice allait sans nul doute m’éclairer sur ce point. Et sur la manière de procéder.

‘’ En fait, le pacte avec son démon est fait contre sa volonté : il n’est pas dompté. Il faut beaucoup de travail et d’effort pour réussir cet exploit. Il a fallut six ans à ta grand-mère et il m’en a fallut douze. Tu mesures donc l’ampleur de la tâche. Cependant, c’est à lui que tu voler le chakra ténébreux qui te permettra de lutter contre des démons plus faibles et que tu devras mêler au tien pour exécuter des techniques qui te permettront de toucher les êtres démoniaques. Car comme tu le sais, seul un chakra presque aussi noir qu’eux peut les affecter. Bien, j’imagine que tu saisis où est la difficulté ? ‘’

‘’ Je n’ai aucun moyen d’obliger Yukora à me donner sa force. Si j’étais plus forte que lui, je le pourrais, mais je n’ai aucun moyen de le lui prendre contre son gré. Et je doute qu’il accepte de bon cœur, étant donné son amour pour moi. C’est déjà dur de lui fermer la porte de mon esprit quand il me saoule … ‘’

‘’ C’est pourtant précisément l’indication qui va te permettre de lui soutirer. Tu n’as jamais trouvé bizarre que tu arrives à empêcher Yukora d’envahir ton esprit alors que tu as un pouvoir dérisoire en comparaison au sien ? C’est pour une raison très simple : le pacte scellé de force avec lui est fait à base de runes qui réduisent sa puissance dans notre monde à presque rien, et c’est pour cela qu’il est obligé de passer par ton corps pour demeurer puissant et ne pas s’évanouir dans les affres du souvenir. En clair, s’il n’a plus ton corps, il disparaîtra définitivement. Ceci dit, ton corps a une maitrise partielle de lui tant qu’il demeure dans ton monde. Tu saisis ? C’est très différent de l’épreuve durant laquelle tu vas dans son monde à lui et où tu es forcée d’employer le chakra ténébreux pour le toucher, là c’est lui qui est contraint. Et comme il a été bardé de runes, tu le domines très largement ! En fait, tu dois trouver, dans ton cœur, l’endroit où il se terre et utiliser la force de ton esprit pour lui soutirer du chakra. Ce chakra est très dur à tirer, et nécessite un sacrifice physique conséquent. En plus, tu vas t’apercevoir qu’il n’est pas adapté au corps humain et qu’il diminue tes capacités. Seulement, il est bien plus puissant que le chakra des simples mortels ; ça aussi c’est un fait avéré. Je vais te faire une démonstration, au même rang que je souhaite que tu atteignes. Observe bien, Tsuyu. ‘’

Les paupières de Shuuna calfeutrèrent ses pupilles derrière une barrière de peau. Elle ne composa pas de signes de main, ce que je notais bien entendu. Si elles n’en utilisaient pas, c’était simplement car l’art du Koumajutsu n’était pas tout à fait un art de shinobi. Plutôt un art de sorciers d’une autre époque, hors de l’ère qui les régissaient alors. Des pouvoirs antiques, malsains, conservées sous un tas de décombres puants, de lierres pullulant, et de blattes tapageuses. Lorsque ses yeux se baignèrent de nouveau dans la pâle lumière de la cave, des cernes violets les cerclaient. Son corps tout entier semblait affable, ses membres affaiblis, tendus par une force surnaturelle qui sapait leur énergie musculaire. Par contre, elle dégageait une aura inquiétante. Cette force surnaturelle la détruisait de l’intérieur, en échange d’une puissance satanique ; ou mieux, d’une surpuissance satanique. Des circonvolutions d’une brume noire, presque invisible, l’entouraient. Elle était revêtue de la carapace d’un hérisson particulièrement cruel et démoniaque, et chacun de ces cercles en était une épine. Malgré mon attrait pour le macabre et ma naissance dans le monde des invocatrices démoniaques, je n’aurais jamais osé toucher ce halo. Honnêtement, il n’exhalait pas vraiment le danger. Juste de la peur. Rien que de la peur. Pas directement la mienne ; mais bien celle de ma mère. Seulement, elle me contaminait, s’insinuait dans la moelle de mes os, et s’entremêlait avec la peur qui naissait en moi au contact de celle-ci.

‘’ Eh bien, Tsuyu. Que comprends-tu en ressentant cette aura ? Tu me sembles bien effrayée, j’espère que cela n’entrave en rien tes capacités sensorielles, et cognitives. ‘’

‘’ N…Non, je suis encore capable de ressentir et d’interpréter. J’ai peur de ce chakra qui exhale de tous les pores de ta peau et qui t’empoisonne et te renforce. C’est vrai. Mais je suis quand même parvenu à en faire abstraction, ou tout du moins juste assez pour qu’il me soit permit de constater un autre phénomène : je ne suis pas la première à avoir éprouvé de la peur. En fait, celle que l’on devrait ressentir en premier lieu est la tienne. Tu empestes la peur à quinze kilomètres à la ronde, sans vouloir être impolie. ‘’

‘’ Ne t’en fais pas, tant que tu donnes la réponse appropriée à mes attentes, je te pardonnerais tous tes écarts. En l’occurrence, tu l’as effectivement donné, donc peu m’importe la manière. Bref, devines-tu où se terrait Bélial et où se terre Yukora ? ‘’

‘’ Oui. Comment l’expliquer … ? Hum … Si on compare le cœur à une ruche où chaque alvéole serait l’abri d’un sentiment ou d’une émotion, je dirais que Yukora abrite dans celle contenant la peur. ‘’

‘’ Concentres-toi sur mon aura, à nouveau. Ne ressens-tu vraiment que de la peur ? ‘’

‘’ Non. Désolé, l’afflux de peur était tellement oppressant que je n’ai pas tout de suite remarqué le reste. Il y a de la haine, de la colère … Et un petit peu de dépit … En fait, c’est tout un assemblage de sentiments, c’est vraiment très compliqué, je n’arrive pas à bien tout décrypter. Je n’y arrive même pas du tout, j’en suis désolé. ‘’

‘’ C’est parce que Bélial est mon démon personnel que tu n’arrives pas à interpréter les sentiments que mon aura dégage. Ce chakra ténébreux est issu de sa personnalité à lui. Tu dois commencer à comprendre, maintenant, non ? ‘’

‘’ Je pense. En fait, il habite en toi et en tout cœur. Je ne sais pas trop comment fonctionne ces runes, mais il est évident que la personnalité du démon nous influence, et que ce chakra est produit à partir des ressemblances entre notre cœur et celui du démon. En fait, si c’est la peur qui domine chez toi c’est parce que Bélial est un démon qui éprouve énormément de peur et que vous en éprouver également. En fait, ce chakra est une sorte de résultat de la balance des différentes émotions éprouvées par le démon et toi-même. ‘’

‘’ C’est très confus, je vais tâcher de t’expliquer de manière plus simple. Les runes attachent le démon à ton corps et font en sorte que tu le maitrises et le domines. Pas en diminuant sa puissance, mais en intégrant sa personnalité à la tienne pour que tu puisses t’accorder à lui et qu’il devienne une partie intégrante de ton corps. Le démon est naturellement assorti avec son invocateur, il est en quelque sorte choisit par la main du destin. Ils sont créés à partir des émotions dites ‘chaotiques’, celles qui peuvent entrainer la mort des hommes, et les éprouvent et les transmettent donc de façon exponentielle, voire miraculeuse, inimaginable. Tu comprendras quand tu te retrouveras vraiment face à face avec Yukora. Leur puissance est absolument faramineuse. Tu éprouves toi-même ces sentiments chaotiques, mais en moindre, et le chakra ténébreux est plus puissant si tu les éprouves toi-même. Je prends un exemple chiffré, avec la peur et la colère. J’éprouve une peur constante et elle est immense. Donnons-lui un chiffre de 10. Par contre, je ne suis pas colérique, même si j’en éprouve tout de même à hauteur de 4. Admettons que Bélial impose une peur de 120 et une colère de 100. Alors la peur générée par mon chakra ténébreux sera de 130/2 : 65. De même que la colère qu’il générera sera de 104/2 = 52. C’est pour cela que plus l’on vit avec son démon, plus l’on éprouve de sentiments chaotiques, plus notre puissance augmente. Tu saisis le principe ? Ces chiffres ne sont bien entendu que pure invention pour tenter de t’expliciter le système de balancier et la façon de devenir plus puissante. Bien, maintenant que tu sais tout ça, explore ton cœur et celui de Yukora et tente d’identifier les sentiments que vous avez en commun et qui seront donc le pilier d’airain de ta production de chakra ténébreux. ‘’

J’acquiesçais. Le concept était assez flou, au début, mais grâce aux quelques calculs basiques qu’elle avait fait pour me montrer comment fonctionner la balance, je comprenais que je devais étayer ma puissance sur deux choses au final : mes sentiments et ceux de Yukora. Pour remporter la lutte mentale qui me permettrait de lui voler sa puissante énergie, il me faudrait faire exploser en moi-même les sentiments qui le composaient, afin que la force des runes puise en lui de la force selon le système de la balance. Et plus je parviendrais à les éprouver, plus je deviendrais puissante. Je jubilais, en espérant que ce serait un sentiment facile à travailler, histoire que je progresse vite.

Yukora : ‘’ Cependant, tu oublies un point essentiel : les sentiments chaotiques contraignent les êtres humains à vivre progressivement de plus en plus seuls. Et tu ne feras pas exception, si tu deviens plus puissante, tu seras de plus en plus seule. Tu comprends, n’est-ce pas ? Tes nouveaux amis, tes ‘équipiers’, ta senseï. Tu profiteras d’eux demain, ou la semaine d’après, voire un mois ou deux si tu es lente, au maximum une année … Et encore, votre relation se détériorera au fur et à mesure. Ils n’y pourront rien, tu n’y pourras rien, mais les sentiments chaotiques qui croîtront en toi te condamnera à être rejetée. Shuuna te l’a dit toute à l’heure, ou te l’as sous-entendu si tu préfères. Es-tu assez forte mentalement pour te damner toi-même ? Abandonne, descelles-moi et abandonne. Il existe un moyen pour toi de te libérer, et de me libérer, et que l’on vive chacun de notre côté. Lâches-moi sur ton monde et tu pourras jouir de la compagnie de tes nouveaux amis. N’est-ce pas ce que tu veux ? ‘’

Tsuyu : ‘’ Non, ce que je veux c’est être forte. Pour pouvoir apaiser ma rage envers les ninjas de Konoha qui ont tué mon père ; pour pouvoir échapper à ma mère et à ma grand-mère qui me retiennent captive. Pour vivre par moi-même. Je réussirais à me créer une double personnalité pour utiliser la pleine mesure des capacités du Koumajutsu tout en restant ce que je veux être. Je lutterais mentalement avec moi-même à chaque instant s’il le faut. Alors cesse de tenter de m’influencer, Yukora. Ca ne marchera pas. D’ailleurs, tu ne voudrais pas coopérer et me prêter ton chakra de toi-même ? ‘’

Yukora : ‘’ Pour épater ta mère, c’est cela ? Non, ça te ferait bien trop plaisir. Et puis, ce chakra est la seule arme que tu pourras employer efficacement contre moi, je ne vais pas te la donner de bon cœur, petite trainée. Démerdes-toi sans. ‘’

Yukora et son aisance pour l’éloquence poétique. Je m’y étais habitué au fil des années passées avec sa présence dans mon crâne. Bon, il m’obligeait à lui prendre de force le chakra ténébreux. Comme ma mère l’avait fait, je fermais les yeux afin de mieux me concentrer sur ce qu’il y avait à l’intérieur de moi. Cette focalisation intrinsèque était quelque chose de difficile, mais que j’avais déjà appréhendé à l’académie, notamment lors des cours concernant la maitrise du chakra, car il fallait contrôler le chakra à l’intérieur de son propre corps, et la métamorphose, car il fallait songer à une foule de petits détails ennuyeux et que fermer les yeux était alors plus facile. Pénétrer mon propre cœur fut assez simple : il suffisait de songer à ce que j’étais, et aux différentes représentations des sentiments chez moi. D’un point de vue spirituelle, on pouvait dire que les deux ventricules était peut-être la représentation du ying et du yang classique : le côté sombre et le côté clair ; le côté noir et le blanc, dont l’entremêlement amenait à l’équilibre, et en l’occurrence à la vie par la circulation sanguine. L’une d’elle renfermait les sentiments dits ‘bons’, et l’autre les dits ‘mauvais’, et selon le point de vue du Koumajutsu ils étaient nommés sentiments chaotiques.

Dans ce mauvais aspect de moi-même, pour moitié, je sentais une conscience. Solidement incrustée dans mon être, mais pour autant pas mienne, un peu comme une excroissance. Une tumeur indélébile que rien n’obligerait à se décrocher. Je savais que c’était Yukora. Je percevais différentes choses qui émanaient de lui sans parvenir toutefois à vraiment les identifier. Comment être sûr de ce que c’était un sentiment ? En analysant ce que je ressentais moi-même en laissant chacune des parties de la force de Yukora, bâtie sur ces sentiments chaotiques, m’imprégner. Je commençais donc par la plus grosse des parties de cette force, le sentiment le plus éprouvé par Yukora. Et ce fut très simple à interpréter : dès que je le laissais pénétrer mon être, ce fut une avalanche de rage sous sa forme la plus simple, la plus hargneuse, la moins cervicale. De la violence, et une envie sourde et franche de destruction et de revanche la composaient. C’était de la colère. J’ignorais s’il était né avec cette colère ou si un événement l’avait amené à l’éprouver, mais en tous cas elle était absolument fantasmagorique. C’était impensable pour un être humain, comme me l’avait dit ma mère.

Yukora : ‘’ Je n’étais pas un démon, autrefois, juste un esprit. Une amie à moi, très ambitieux, s’est versé dans les arts démoniaques pour devenir plus puissant. Il n’était pas mauvais, juste un peu trop désireux d’avoir une place plus importante dans la hiérarchie, de devenir un de vos dieux vénérés et protecteurs. Ce sont eux qui l’ont détruit, même s’il n’avait rien fait. J’ai juré d’annihiler leur création pour venger cette amie. Hum … Pour te donner une idée, cette amie était ce qu’est pour vous une femme. Et vous savez que les sentiments des démons et des esprits sont démesurés comparés aux vôtres, puisque nous sommes créés à partir d’eux et uniquement d’eux, nous n’avons pas de vrai charnel si nous ne prenons pas possession d’un corps. Imagines-tu mieux pourquoi cette rage qui m’habitue est si démesurée à tes yeux ? ‘’

C’était assez déstabilisant qu’il me l’explique. Il me l’avait déjà dit précédemment, cependant : il ne tenait pas à ce qu’on le voit autrement que comme il était. Je choisis de ne pas répondre. S’il avait de la colère et que c’était mon démon personnel, c’est que j’en avais aussi, et qu’elle me dominait. Là, j’eus moins de souci à comprendre le pourquoi. J’étais née avec un destin tout tracé de fille haïe, d’invocatrice démoniaque, et j’avais perdu mon père avant même d’avoir put profiter de son amour. J’étais en colère contre le hasard et contre tous les autres qui m’avaient insultés, avaient piétinés ma fierté, alors qu’ils avaient eu une vie où ils auraient put faire des choix. J’étais prisonnière de ma mère et de ma grand-mère à cause de Yukora : si je n’apprenais pas les arts démoniaques, il finirait par trouver un moyen de me contrôler et de me détruire. Et il ne serait pas délicat et attentionné, c’était le cas de le dire. Et il y avait ces ninjas de Konoha qui avaient tué mon père pendant une altercation mineure entre les villages, alors que c’était un civil ! Affaire étouffée, cela allait de soit. Ma colère m’envahissait maintenant pleinement, j’en avais les bras qui tremblaient … J’essayais de la maintenir tout en analysant le reste des sentiments de Yukora …

De la tristesse, bien entendu : tout comme j’avais moi-même perdu mon père, il avait perdu son amie, un être très cher à son cœur. Et également le dépit, car il n’avait rien put faire pour empêcher les moines de stopper ses plans de destruction et de l’enchainer définitivement dans le monde des esprits … Je retrouvais cela chez moi dans ma tendance à me trouver trop faible, et à n’avoir jamais put encore me défaire de l’autorité parentale et de celle du village. Il y avait aussi ces amis récents que j’allais perdre à cause du Koumajutsu … Le troisième et dernier sentiment semi-majeur, avec la tristesse et le dépit, devait être l’espoir. Car il aurait une dernière chance quand viendrait l’heure de m’affronter, de retrouver un corps. Je déglutis en pensant à tous ces sentiments accumulés, et à cet espoir, qui seraient dirigés contre moi dans cette bataille finale … Mais mes propres sentiments y prendraient part également, et avec eux mon envie infaillible de devenir plus forte, et mes espoirs qui étaient placés en cette ultime invocation du Koumajutsu. Quand j’aurais vaincu Yukora, je serais assez forte pour m’affranchir de l’autorité de ma mère et de ma grand-mère, je leur échapperais et mènerais ma propre vie. Je voulais devenir une kunoichi aimée et respectée, même si cela devait me prendre plus de vingt ans !

Tout cela prit forme, exhalant de moi sous la forme d’une aura comme cela l’avait fait pour ma mère … Guère impressionnante tant que je n’aurais pas soutiré son énergie noire à Yukora, cependant. Désormais complètement prisonnier du moule de mes sentiments et de leur puissance runique, il n’eut pas le choix que de me céder sa force. Pas entièrement, car mes sentiments n’étaient pas assez forts, cela allait de soit, mais tout du moins une partie intéressante selon le système de la balance. Le chakra ténébreux envahit bientôt mon système sanguin, mon sang baignait dedans. Je trébuchais et dus me retenir contre un mur à l’aide de mon bras : ma force et ma résistance physique avait violemment décrus, au contraire de mon chakra dont la puissance saturait presque sa circulation.

Tsuyu : ‘’ Quelle force incroyable ! Elle alimente mes réserves de chakra en permanence, j’ai l’impression qu’avec ça, je ne pourrais plus tomber à court de chakra ! Cependant, c’est à utiliser avec parcimonie : l’énergie nocive de Yukora aurait vite fait de devenir extrêmement nuisible à mon corps. Hum, par contre j’ai l’impression qu’elle stimule quelque peu mon activité sensorielle : j’ai l’impression de distinguer la moindre anfractuosité entre les vieilles briques du mur, avec une précision que je n’ai pas d’habitude … Et que je n’avais pas quelques secondes plus tôt. ‘’

‘’ Apparemment tu as remarqué que ce n’est pas que ton chakra qui est plus puissant sous le régime des ténèbres. Il y a des effets secondaires qui affaiblissent grandement ton corps : si tu actives ce chakra ta force te quitte et il devient inutile pour toi de frapper au corps-à-corps, tu dois donc à tout prix chercher le combat à distance. De plus, tu auras remarqué qu’il peut renforcer ton corps d’une autre manière, plus subtile. Stimuler tes sens ou ton activité cervicale, sous son influence, est possible. Ce n’est pas poussé à l’extrême, loin de là, mais c’est un petit bonus qui peut s’avérer intéressant dans certaines situations. Bien. En tous les cas le chakra ténébreux qui émane de toi est de bonne qualité, et de bonne quantité je dirais. A mes débuts, mes sentiments chaotiques n’étaient pas aussi forts, et je dois t’en féliciter. Tu es très prometteuse, Tsuyu. ‘’

Tout en parlant, elle venait de saisir une pochette que la grand-mère venait de lui donner, et me la tendit. Je l’ouvrais et découvrait un stylet orné de runes et d’un petit crâne aux yeux rougeoyants, des petits couteaux, et divers poudres et crèmes servant aux maquillages rituels.

‘’ C’est un nécessaire de rituel, on te l’offre. Non, ne me remercie pas, c’est une tradition de famille : quand une jeune fille parvient à maitriser le chakra ténébreux, elle a le droit de posséder une pochette comme celle-ci afin d’invoquer des démons dans son corps. Tu auras remarqué que nous n’utilisons pas d’encre : toutes les invocations requiert ton sang, et éventuellement de ton énergie. Il y a des petits couteaux qui servent à t’entailler pour réaliser les rituels : tu dois les planter au centre des pentagrammes lorsque leur lame est couverte de sang. Pour les invocations mineures, il n’y a pas lieu d’en utiliser plus d’un, mais les invocations majeures demandent un tribut plus conséquent, et deux entailles sont nécessaires. Avec eux, le flacon pour contenir le sang, et les bandages pour empêcher le sang de s’égoutter sur ton pentagramme et de le fausser … Avec la magie noire, mieux vaut être prudent. Quand tu aborderas des invocations encore plus dangereuses, comme les Princes infernaux ou ton démon personnel, tu verras qu’il faut avoir un sens du sacrifice très développé pour être un maitre du Koumajutsu. Bref, voilà. Le stylet, lui, te servira à tracer les pentagramme avec le sang qui coulera de tes entailles, et les poudres et les crèmes sont là selon les fantaisies que les démons peuvent avoir pour leur invocation. Bon, tu as avalé des livres entiers sur la démonologie pendant ton enfance, tu en sais assez pour utiliser tout cela, et tu sais déjà tracer des pentagrammes, il est inutile de s’épancher là-dessus : lorsque tu pratiqueras ton premier rituel de l’Epreuve, puis le rituel d’invocation, on constatera si tout cette emmagasinement de connaissance a ou non servit. Choisis donc le premier démon que tu invoqueras. D’après tes souvenirs et tes lectures, y’a-t-il un démon, mineur si possible pour commencer, qui t’as tapé dans l’œil ? ‘’

‘’ Eh bien ce n’est pas tout à fait un démon mineur … ‘’

‘’ Et puis quoi encore ! Elle va se tuer à son premier essai cet imbécile ! ‘’

‘’ … mais ce n’est pas non plus un démon majeur particulièrement puissant … Je dirais que c’est un intermédiaire … ‘’

‘’ Oui mais on t’a demandé un démon mineur. ‘’

‘’ Maman … J’ai bien dit : si possible. Donc elle n’est pas obligée de commencer trop bas non plus. S’il n’est pas trop puissant, je ne vois pas le problème. Mais il te faudra être prudente et bien étudier son profil avant de l’affronter. Tu n’as pas l’air surprise, je suppose que tu as déjà réfléchit à la question. Allez, parle-moi un peu de ce démon et des atouts que tu as pour l’affronter. ‘’

‘’ C’est un démon nommé Abaddon, et son symbole est la sauterelle. Tout comme Astaroth, même s’il est bien moins puissant, il commande des légions infernales, qui se manifestent sous la forme de sauterelles qui dévorent tout sur leur passage. C’est elles qui sont véritablement dangereuses … Lorsqu’il sera invoqué dans mon corps, je pourrais en faire apparaître, pour une courte durée, une demi-légion, afin qu’elle assaille mon ennemi. Il maitrise également quelques facultés ténébreuses mais c’était indiqué qu’elles ne sont pas utilisables dans la dimension de l’Epreuve, où le pentagramme d’Epreuve l’affaiblira. Cependant, ses sauterelles sont un problème de taille, puisqu’elles sont capables de me dévorer. J’ai donc réfléchit à une parade et en me rappelant mes lectures, j’ai découvert que j’étais exactement apte à lutter contre Abaddon : ses légions craignent l’eau. En fait, si je leur balance une série de boules aqueuses avant qu’elles ne me touchent, elles ne me feront pas de dégâts. De plus, Abaddon est lui-même un démon-sauterelle, en version agrandie, c’est-à-dire que si je parviens à lui infliger une rafale complète de mon attaque Suiton, je peux le vaincre. Ce pourrait se révéler complexe, mais avec une feinte appropriée, je pense que je peux l’avoir … Il faudrait que j’esquive une attaque avec un Suiton, et que je profite de sa surprise pour mettre mon plan en branle. Et conclure en le mettant hors-jeu à l’aide d’une attaque d’eau. ‘’

‘’ Tu as d’avantage songer à la question que je ne pensais. Bien, est-ce que tu te souviens du rituel d’invocation et de celui d’Epreuve ? Non, bien entendu, tu ne t’y intéressais pas encore quand tu as lu ce qui le concernait, pas vrai … mais ce n’est pas bien grave. J’ai ici un livre les relatant. Alors … Voyons-voir … Voilà, Abaddon. Hum, c’est un démon majeur de faible niveau mais il n’empêche qu’il a une bonne réputation et un cursus intéressant : ses légions, même si elles ne sont pas aussi fortes que celles des autres majeurs, restent redoutables pour la chair humaine, animale, et pour les végétaux. Elles dévorent facilement tout ce qui est vivant. Et, surtout, elles sont nombreuses. Très nombreuses. En plus, il avait tout un peuple, il y a longtemps, qui le vénérait. Les Ksheuts. Un peuple pacifiste qui ne guerroyait pas, il existe encore quelques descendants qui le prient … Ce peuple vivait d’agriculture et, quand ils étaient attaqués, ils demandaient aux légions d’Abaddon de décimer les récoltes et le bétail de leurs ennemis. En échange, il leur offrait un généreux tribut en sang : ils sacrifiaient un vieil homme et mettait toute son hémoglobine dans une très grande jarre, et ils célébraient le démon lors d’un rituel. A cette époque, c’était d’avantage une divinité guerrière qu’un démon, seulement les désastres et les famines occasionnés par les attaques de ses sauterelles l’ont amené à être condamné aux enfers. En voilà un qui a été bien ballotté. Niveau personnalité, c’est un démon bien classique : il a le goût du sang et de la chair, est à peine plus agressif et sournois que la moyenne des entités … Bref, très classique de caractère, mais possédant cet intéressant pouvoir sur ses insectes. Tu as fait un bon premier choix, d’autant plus que tu as les armes pour lutter contre lui. J’ai toujours pensé que tu rejetais le Koumajutsu, mais tu es surprenante, Tsuyu. Tu as dû bien étudier la question … ‘’

‘’ Je n’aime peut-être pas qu’on m’impose un destin, mais je ne suis pas assez stupide pour ne pas saisir toute cette puissance alors qu’il m’ait donné de la posséder au prix de quelques sacrifices corporels. Donc, oui, j’ai soigneusement étudié la manière d’exploiter au mieux l’art des invocations démoniaques. ‘’

‘’ Déchires la page du bouquin, puis suis-moi, je vais t’emmener dans la salle de l’épreuve. A l’intérieur, tu traceras le pentagramme de l’épreuve seule, et tu devras te débrouiller pour vaincre Abaddon. Quand tu l’auras vaincu, son esprit sera assouvi par les runes qui ont scellé en toi la possibilité d’invoquer les démons vaincus, et tu pourras l’invoquer à satiété. Ah, et n’oublie pas d’employer le chakra ténébreux pour utiliser tes attaques aquatiques : c’est le seul qui pourra vraiment l’endommager, qu’importe la force de ses attaques. Même s’il vient dans notre monde, seul la force d’un autre démon, ou une force pure, bénie, que nous ne possédons pas, peut vaincre un démon. ‘’

Je lui emboîtais le pas, réalisant qu’il y avait plus profond encore, dans cette cave qui me paraissait déjà plonger dans l’antre des enfers. Elle devait mener aux enfers à proprement parler, et ne pas se contenter de la simple porte.
Après avoir descendu prudemment un escalier plonger dans une pénombre moite, où chaque marche était si mousseuse et humide que mon pied menaçait de glisser, m’envoyant dégringoler en roulades douloureuses le reste des marches. Heureusement, ma mère ne me pressa pas, et mes pas précautionneux eurent raison de ce premier obstacle vers l’affrontement du démon. Et mine de rien, ce n’était pas forcément le plus aisé à franchir ! Car même si elles étaient spumeuses et craquelées, ses marches étaient de marbre et toute chute aurait été mortelle. Grand-mère ne nous avait pas suivis, et je la soupçonnais de ne pas vouloir risquer ses précieuses ridules dans une action fourmillante de danger, alors que ses membres ne la portaient plus aussi simplement qu’auparavant. Je ne lui en voulais pas, car sa présence transformait parfois ma mère au point qu’elle devenait froide et cassante, et elle-même était insupportable et odieuse. Pour ma concentration et pour de meilleures conditions avant ma rixe anthropodémoniaque, mieux valait qu’elle ne soit pas là.

‘’ Voilà la porte, je t’attendrais ici. ‘’

Je poursuivais mon chemin et abaissais la poignée de la porte, afin de pénétrer dans cette fameuse pièce. La pièce de l’Epreuve, dont mes deux ainées m’avaient si souvent parlé, et où elles avaient elles-mêmes accomplit le défi pour chacun de leur démon. Elle n’était pas spécialement grande, c’est ce qui me frappa en premier lieu : pour un affrontement, j’avais imaginé un gigantesque temple ; et je tombais sur un simple sanctuaire. En tous les cas, la pierre était vieille et les rares ruines de bâtiments étaient presque rasées. Presque ; cela demeurait de possibles cachettes pour échapper à la vue d’Abaddon. Ou de n’importe quel démon que j’affronterais dans le futur. Il n’y avait pas la moindre trace de végétation, et la seule lumière qui permettait d’y voir à eu près clair provenait de torches accrochées au mur. Curieusement, le fait que personne ne soit venu dans la salle depuis bien des années ne semblaient pas les empêcher de luire de la même manière qu’il y avait cinquante ou cent années. Ma mère m’en avait parlé, quand j’étais petite : les torches de la salle de l’Epreuve avaient été allumées grâce à l’enchantement d’un démon invoqué dans le corps d’une invocatrice, et le feu était immuable et ne faiblirait jamais. A part sous les vagues d’un démon particulièrement puissant, éventuellement.
Je remarquais, avec un petit peu de retard à cause des flammes qui n’éclairaient pas tellement les murs qui encadraient la salle, que ceux-ci étaient envahit par des runes. Il y en avait partout, gravées dans la roche avec la magie des premières invocatrices. Elles donnaient à l’atmosphère une ambiance … un peu plus mystérieuse, mystique. Et en s’alliant à la pénombre, indubitablement inquiétante, voire glauque.

Je repérais l’autel, où était tracé le pentagramme d’Aldébarran. Ce pentagramme était formé avec de multiples branches d’une complexité incroyable, et peu d’invocatrice avait eu assez de talent pour le retracer sans le modèle ; or il était absolument indispensable à l’épreuve. Je devais ajouter la marque d’Abaddon au centre de ce pentagramme, non en le gravant dans la pierre comme le pentagramme d’Aldébarran, mais avec mon sang, de sorte de pouvoir l’effacer après l’affrontement avec Abaddon. J’examinais la page du livre, puis m’attelais à reproduire le symbole d’Abaddon. Tout d’abord, à l’aide d’un des couteaux, j’entaille le dessus de mon avant-bras, traçant une estafilade sanglante sur ma peau. J’en fis une seconde sur l’autre avant-bras, et en versait le sang dans un flacon. Ceci fait, je bandais mes deux bras afin de les laisser se reposer. Ce n’étaient pas là des soins, juste de quoi empêcher de nouvelles gouttes pourpres de souiller mon dessin, et donc mon travail. Une grimace de douleur barrait mon visage, mais je m’exerçais à la réprimer pour paraître forte. Même si personne ne me surveillais, je préférais me laisser croire que j’étais intouchable, pour le moment. Ensuite, je pris le stylet et trempais son pinceau dans le sang encore chaud. Une fois les poils soigneusement imbibés de sang, et essuyés sur le bord du flacon pour ne pas l’être trop et rester aisément manipulables, j’entamais mon dessin. Quelques petits pentagrammes et ornements classiques, qui ne me prirent pas plus de cinq minutes ; puis le signe spécifique d’Abaddon, du genre compliqué : l’insigne de la sauterelle. Je fis une ou deux bavures, mais ma maitrise de l’eau appela à mon aide du liquide depuis celui présent dans l’air, afin de m’aider à gommer et m’offrir une seconde chance. Le résultat final fut assez périlleux à obtenir, et je mis bien une demi-heure avant d’être parfaitement satisfaite, mais il fut à la hauteur de mes attentes : il ressemblait beaucoup au modèle présenté sur le livre. Je n’avais plus qu’à prononcer la petite incantation, et l’épreuve commencerait. Avant cela, je pris le temps d’attacher mes cheveux, et de bien me concentrer. Je n’aurais pas le droit à l’erreur.

‘’ Par toi, je pénètrerais dans la cité des peines
Par toi, je pénètrerais dans la douleur sans fin,
Par toi, je pénètrerais parmi la gent perdue.
L’injustice guidait la main de ton auteur ;
Le pouvoir impie t’as fait venir au monde
Ennemi de la sagesse et destructeur de l’amour.
Nul autre objet créé n’existait avant toi,
A part les éternels, et tu es éternel,
Et je t’appelle à moi, ayant abandonné l’espoir …
Sors du monde des esprits, ô, Abaddon ! ‘’


Le pentagramme s’illuminait. Ni une, ni deux, je partis me dissimuler derrière une ancienne colonne, qui devait faire partie des fondations d’un temple. Abritée, j’eus l’audace de laisser mes poumons s’oxygéner. Le démon n’était pas encore apparut. L’adrénaline montait progressivement en moi, et devait contribuer à mon sang-froid et à la précision de mes mouvements et de mes pensées. Je me concentrais sur mes sentiments chaotiques, afin d’usurper à Yukora du chakra ténébreux. Le démon ne put rien y faire, et dut bien me le céder. Sur l’autel, Abaddon était apparut et dépliait ses larges ailes membraneuses. Son apparence n’était pas surprenante, compte tenu de la description du livre : un humanoïde ressemblant fort à une sauterelle, tout de noir vêtu. Ses yeux, des sphères blanches où ne trônait aucune pupille, balayèrent la salle. Il semblait surprit. Pourtant, ce n’était pas la première fois qu’une invocatrice tentait de pactiser avec lui.

‘’ Tsuyu Kurage ? On nous avait pourtant certifié que les démons majeurs n’auraient rien à redouter de toi pendant les prochaines années. Et aucun démon mineur n’a été invoqué récemment. Tu as choisis le grand pas de toi-même ? Tu es bien naïve de croire que tu parviendras à le franchir. Bon, et si tu cessais de te cacher, qu’on puisse s’affronter en face à face ? ‘’

Je ne bougeais pas, tâchant de me calmer et de réciter dans ma tête ce que j’allais faire. Alors que j’allais m’élançait, un bourdonnement attira mon attention sur ma droite et j’eus tout juste le temps de me jeter sur le côté pour éviter d’un banc de sauterelles voraces ne me dévore. Je ne pus d’ailleurs pas les empêcher d’entamer ma chair, au niveau de mon avant-bras. Là où les insectes mordirent, ma viande était à vif, on en voyait le rouge sanguin à l’œil nu. Heureusement, j’avais évité le pire et il n’y avait aucune vraie entaille, seulement de la peau qui avait été arrachée à coups de dents. De milliers de petites dents. Et cela brulait. C’était juste à côté de l’entaille du couteau de rituel. Elles devaient être attirées par le sang …

‘’ Tu ne croyais tout de même pas tromper mes sens, fillette ? Je suis un démon majeur ! Je vais te faire payer au centuple ton audace insensée qui m’humilie et me rabaisse. Tu es une débutante, tu n’as pas l’étoffe pour affronter un démon aussi puissant que moi ! Déferlante de sauterelles ! Allez, mes légions, le dîner est servit ! ‘’

Une salve de sauterelles, frétillant déjà de la future dégustation de son gibier, et curieusement m’imaginer ainsi me mit à l’aise, jaillit de nulle part et fondit vers moi. L’essaim allait vite, je n’avais que quelques secondes pour réagir. Seulement, ce fut amplement suffisant : quelques signes de mains adroits, des ponctions dans le chakra ténébreux, et des projectiles d’eau violette jaillir de ma bouche et s’écrasèrent sur la nuée. Les insectes s’effondrèrent par pans de légion entiers sur la pierre crevassée. Ils furent rapidement tous à terre. Un ou deux parvinrent à s’en sortir, mais, désorientés, ils partirent s’écraser contre un mur, d’où ils glissèrent minablement à terre. Abaddon sembla surprit, et j’en profitais pour enchainer en lui envoyant une rafale identique … Il les para simplement en repliant ses ailes devant lui, comme un bouclier.

Seulement, je profitais de ce moment où il ne pouvait pas me voir pour déclencher ma véritable attaque ! Lorsqu’Abaddon émergea de sous ses ailes, une seule fillette lui faisait face, et, furieux de la résistance inattendue de son adversaire, il envoya aussitôt trois légions la dévorer. Celle-ci explosa dans une gerbe de fumée : un clone ! Il n’avait pas pensé à étendre ses sens magiques pour voir autre chose que ce qui lui faisait face, trop agacé par mes tentatives qu’il jugeait puériles et humiliantes. J’en avais profité pour courir jusqu’à une colonne, que j’utilisais comme essor à l’aide de l’adhésion, afin d’effectuer un saut qui m’amena au-dessus d’Abaddon. C’est là qu’il vit mon ombre se profiler au-dessus de lui et leva la tête … une attaque aérienne ! Les boules aqueuses le cueillirent de plein fouet, et il fut forcé de s’aplatir contre le sol. Très faible face à cet élément, il ne pouvait plus bouger lorsqu’il était trempé, je ne l’ignorais pas : ma préparation portait ses fruits. Après avoir récupéré de ma chute lourde, et douloureuse, j’eus tout le loisir de tracer autour de lui le pentagramme de soumission et de mettre fin à cet affrontement.

En sortant de la pièce, je m’effondrais dans les bras de ma mère, exténuée, mais fière d’avoir dompté mon premier démon.
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Kimatzu
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MessageSujet: Re: En bordure du village, résidence des Kurage   En bordure du village, résidence des Kurage EmptyLun 14 Juin - 19:43

[J'ai eu du mal à tout lire T.T]

[Tsuyu : techniques ok, mais tu ne peux pas utiliser l'invocation d'Abaddon tant que tu n'auras pas 20 en Koumajutsu, on est d'accord.]

[Tsuyu : 64 xp...]
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Tsuyu
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MessageSujet: Re: En bordure du village, résidence des Kurage   En bordure du village, résidence des Kurage EmptyMer 16 Juin - 14:42

Je clignais des paupières, m’éveillant après un sommeil lourd. Patiemment, je reprenais le contrôle de mon corps, étirant chacun de mes membres. J’étais simplement sur mon lit, toute habillée. Il me fallut quelques secondes pour me souvenir de ce qu’il s’était passé : un duel à mort avec Abaddon, le démon-sauterelle, qui avait aboutit à ma victoire et au scellement du pacte. Je souris. Cette victoire, ma première en tant qu’invocatrice, était très importante et marquait mon entrée dans le monde du Koumajutsu. Après un ultime bâillement, qui acheva de dégourdir mes bras et mes jambes, je me levais. Sans plus de considération pour mes vêtements encore poussiéreux de mon séjour dans la cave, je me dénudais et les empilais sur mon lit. Maman savait très bien que je faisais ça quand je n’avais pas le temps de les laver moi-même. Ainsi dévêtue, je me glissais vers la petite salle de bain périphérique à la chambre à coucher, et me faufilais sous la douche. Le carrelage froid, sous mes pieds, me fit frissonner, mais pas autant que les premières salves d’eau, qui m’arrachèrent un gémissement. Enfin, quand l’eau fut tiède et que je pus me savonner à mon aise, l’eau me fit un bien fou. Déjà parce que mes muscles connurent un deuxième éveil, autrement plus doux que mes étirements forcés, et aussi car m’isoler du monde, me concentrer simplement sur le bruit des gouttelettes d’eau qui s’effondraient vers le siphon, me permettait d’être connectée, mais aussi déconnectée. Enfin, j’avais moi aussi le bénéfice d’un réveil plus doux, je ne sais pas si vous comprenez où je veux en venir.

Après m’être rapidement séchée, j’avais filé vers l’armoire pour choisir une tenue. Bon, les sous-vêtements, c’était toujours très rapide : personne ne les voyait, et puis ils étaient tous pareils, pas besoin de trop réfléchir. En revanche, sans mes deux robes fendues noires, je ne savais pas trop ce qui conviendrait à un entraînement. L’une d’elle était avachie sur mon lit, et l’autre encore dans le panier à côté de la machine à laver : ma mère n’était pas vraiment une grande ménagère et … Et mes yeux s’écarquillèrent de surprise. Comme neuve, la deuxième en question trônait au-dessus de la pile de mes vêtements.

Tsuyu : ‘’ Maman … ? Tu l’as déjà lavée ? Mais … D’habitude ça prend au moins un mois … Je ne sais pas ce qu’il lui arrive en ce moment, elle se comporte d’avantage comme une mère. Peut-être que s’il n’y avait pas mamie la vie serait plus douce, à la maison. Enfin, l’essentiel est là, elle a pensé à moi. Merci, maman … ‘’

J’enfilais rapidement ma tenue favorite, sachant qu’ainsi parée, j’étais parfaitement à l’aise pour repartir m’entraîner. Quelques bruits de pas m’indiquèrent que ma mère était entrée dans la chambre. Je me tournais vers elle, et la remerciais de son attention.

‘’ Mais tu n’as pas à me remercier, Tsuyu, c’est parfaitement normal. Je m’interrogeais juste … Tu reprends déjà l’entraînement ? Tu as eu une sévère maladie récemment, et tu as affronté Abaddon hier après-midi. C’est beaucoup, tu prends des risques. ‘’

‘’ Ne t’en fais pas ! Je ne suis pas en sucre, maman, je me sens même en pleine forme. Cette maladie m’a déjà gâché beaucoup de temps, et j’ai envie de devenir plus forte. J’ai besoin de l’être. ‘’

‘’ Je comprends très bien. N’en fais pas trop quand même, tu es la dernière héritière des Kurages, et ma seule fille. ‘’

J’acquiesçais simplement, et accrochais ma pochette d’armes à ma cuisse, mon fouet autour de ma taille. Après lui avoir souhaité une bonne journée, je m’éclipsais. Je n’aurais peut-être bientôt plus le droit d’avoir des amis et des équipiers, autant que j’en profite maintenant !

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MessageSujet: Re: En bordure du village, résidence des Kurage   En bordure du village, résidence des Kurage EmptyMer 16 Juin - 15:27

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